Vivo
lo sociablo !
(un
"b" de trop ?)
Nous
reproduisons ci-dessous intégralement un article paru le 1er septembre
1901, dans le Réveil du Centre, journal quotidien d'union
républicaine socialiste. L'auteur, qui ne signe pas, répond à un
article publié dans la Gazette du Centre la veille, intitulé
"Le
B fâcheux". Ce texte s'inscrit dans le jeu des critiques mutuelles
des journaux et bien sûr des courants d'idées qu'ils expriment,
souvent d'ailleurs beaucoup plus violents. On y apprend, incidemment,
autour d'une querelle idéologique à propos des adjectifs
"sociale" et "sociable" (le socialisme
n'apparaissant guère sociable aux yeux du journaliste du quotidien conservateur)
que les habitants des quartiers des ponts, à la réputation sulfureuse,
criaient en occitan : Viva la sociabla ! (orthographe
normalisée) pour dire franchement, sans chercher à jouer sur les mots
: "Vive la sociale !"
« Vivo lo Sociablo ! »
L’un de nos confrère
qui, à la Gazette, signe J. B., possède énormément
d’esprit. L’esprit est une chose si rare aujourd’hui que nous
constatons le fait avec le plus grand plaisir. Tant que M. J. B. écrira
à la Gazette, on ne pourra pas dire que nous ne sommes plus le
peuple le plus spirituel de la terre. Que les cieux protègent donc J.
B.
Ceci dit nous voudrions
cependant faire comprendre à notre confrère que sa verve caustique
manque un peu de bonne foi.
Vous savez peut-être
qu’au moment où M. Vacherie déclarait close la session du conseil général,
le docteur Girard cria : « Vive la République sociale !
». Cri malencontreux. Le lendemain les journaux constataient que notre
ami, avait fait une pose de plusieurs seconde entre les deux derniers
mots, et ils concluaient – naturellement – que Girard avait peur de
la sociale... Aujourd’hui, J.B. a trouvé mieux, il ajoute au cri de
« Vive la République sociale », une lettre, une seule
lettre, et vous ne pouvez savoir combien cela en dénature le sens.
Lisez plutôt : Vive la République « sociable ! »
Hein, comme c’est imaginé. Et vous voyez d’ici la petite discussion
étymologique qui s’en suit.
Le docteur Girard
demande une République « sociable », et l’eût-il crié,
qu’en somme il n’aurait fait que traduire l’opinion d’une bonne
partie de notre population et qui n’est pas la moins intéressante, la
moins à même de juger des bienfaits de la République... réactionnaire
et cléricale.
Nos amis de la quatrième
section, les électeurs de « l’écume des bas fonds »,
comme les traite la Gazette, qui sont tous des socialistes
convaincus, crient depuis longtemps : Vivo lo sociablo !
Est-ce là une altération étymologique, est-ce au contraire leurs
aspirations qu’ils traduisent ainsi ?
Pour plaire à J.B.
nous prendrons la deuxième hypothèse.
Non la République
n’est pas encore la République Sociable, puisque, malgré tout ce qui
a été fait jusqu’à présent, elle est encore encombrée par les
moines, et infestée de réactionnaires.
Cela, M.J.B. vous paraîtra
du sectarisme. C’est cependant un point de vue auquel on peut se
placer sans être accusé de paradoxe.
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